L'escargot du développement d'une communauté

Cet espèce de dessin n’est pas une oeuvre d’art dont je serai extrêmement fier mais l’illustration dessinée hier au tableau, avec une vraie craie, dans le cadre d’un cours sur les logiciels libres à l’IUP Infocom de l’Université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand. J’avais convié l’ami Yoan De Macedo a venir expliquer aux étudiants comment sa société Octolys pouvait vivre en développant et en donnant le logiciel de boutique en ligne Thelia. Un modèle tout à fait intéressant.

La société illustre aussi très bien comment un logiciel libre peut se développer. Cet escargot est la représentation d’un développement qui peut s’appliquer à beaucoup de choses. Le point central de notre escargot est Yoan, développeur du logiciel. A partir de ce point central se construit un outil libre, une communauté, une société, des utilisations. Chaque personne participant au logiciel fait grossir la communauté. De nombreux profils ont participé :

  • développeurs du noyau du logiciel mais aussi des plugins,
  • développeurs trouveurs du bugs ou de failles,
  • graphistes et intégrateurs qui mettent en place des boutiques,
  • clients qui l’utilisent au quotidien et font remonter de l’info mais pas que,
  • contributeurs au forum, wiki qui apportent une aide à la société mais aussi aux autres utilisateurs,
  • autres sociétés types agences web qui adoptent ce logiciel pour vendre des boutiques à leurs clients,
  • personnes qui invitent Octolys à venir parler de leur logiciel,
  • traducteurs,
  • rédacteur d’une tutorial, d’une fiche d’aide, d’un livre,
  • personne qui le conseille à ses amis, à ses contacts,
  • moi, vous, nous…

Ma contribution à la communauté est plus que modeste. C’est même Yoan qui me rend un grand service en venant partager son expérience avec mes étudiants. Mais quelque part nous avons fait rentrer les étudiants dans la communauté. C’est modeste mais peut être l’un d’eux deviendra utilisateur, client, contributeur, fournisseur,…

Je trouve, même si mon dessin n’est pas très beau, que cet escargot est fondamental.** Il montre en fait le côté exponentiel d’une communauté.** Quand on parle de réseau, on dit que **chaque nouveau membre fait doubler la valeur du réseau. **Un membre démultiplie les possibilités d’interactions à l’intérieur de la communauté mais aussi avec l’extérieur.

Bien entendu cela ne se fait pas sans mal et Yoan l’a très bien expliqué aux étudiants hier. Un logiciel libre sans communauté autour n’existe pas. Mais faire naître puis vivre la communauté du logiciel une tâche longue et ardue. Il a fallu à Octolys déployer beaucoup de temps et de patience pour se faire connaître, se faire apprécier, se faire aider. Octolys donne beaucoup pour aider les autres mais obtient finalement aussi beaucoup.

Pouvoir vivre d’un tel projet et créer des emplois n’est-il pas en soit fabuleux ? Mais Yoan avait calculé l’an dernier qu’en fait Octolys ce n’était pas 4 ou 5 personnes qui travaillent à plein temps et qui sont salariés d’Octolys mais l’équivalent de 17 personnes à plein temps si on considère le temps passé des uns et des autres. Chacun se rémunérant sur un bout du gâteau : vie de la société, vente de services autour du logiciel, vente de produits grâce au logiciel…

Cet escargot n’est pas propre au logiciel libre

Facebook illustre incroyablement le côté exponentiel d’un site fonctionnant en réseau. Chaque nouveau membre est un vecteur pour entraîner de nouveaux membres et « enrichir » le réseau. Chaque nouveau membre est une raison pour les autres de s’inscrire. Les premiers inscrits, notamment en France, ne savaient pas trop quoi faire d’un tel outil tant qu’il n’y croisaient pas suffisamment de monde. Regardez la vitesse d’accroissement de Facebook, combien de temps il a fallu pour obtenir les premiers millions de membres et combien Facebook gagne de membres par mois.

À une moindre échelle ce qui est vrai pour Facebook est aussi vrai pour vous. Que vous vous lanciez dans la création de votre propre réseau social, de votre propre communauté, de votre blog ou votre site, il faudra y aller « avec les dents » pour gagner les premiers fans et membres, les convaincre. Pas facile pour une page fan de marque de dépasser 100 fans, puis 1000 puis 10.000 !

Mais au fur et à mesure que vous en gagnez vous démultipliez les chances d’en gagner d’autre… à condition bien entendu d’entretenir la dynamique. C’est un point fondamental et il est clair que la dynamique peut se gripper aussi rapidement qu’elle s’est lancer. Décevez vos membres, ne répondez pas, ne les écoutez pas, mentez leur… et vous risquez de les voir partir pour ne jamais revenir. C’est aussi pour ça que les moyens artificiels de faire grossir le nombre de membres, notamment avec des concours, est bien trop souvent illusoire. A quoi bon avoir  10.000 membres si aucun ne participe ?